Actu Fiscale

24
Mai

La « prépondérance » immobilière en question

Un entrepreneur acquiert les actions d’une société immobilière, propriétaire d’une forêt. Cette vente a été soumise aux droits d’enregistrement applicables aux actions, au taux réduit de 1,1 % (à l’époque – 0,1 % aujourd’hui). Sauf que, pour l’administration, il s’agit d’une société à prépondérance immobilière…. Et le taux applicable est loin d’être le même…

Prépondérance immobilière : un taux fixé à 5 % !

Un entrepreneur acquiert les actions d’une société immobilière, propriétaire d’une forêt. Pour le calcul des droits d’enregistrement, il a fait application du taux prévu pour les cessions d’actions (1,1 % à l’époque des faits – 0,1 % aujourd’hui).

Mais l’administration, estimant qu’il s’agissait d’une société à prépondérance immobilière, a rectifié ce calcul en retenant le taux applicable à ce type de société, à savoir 5 % (toujours en vigueur aujourd’hui).

Pour elle, en effet, cette société répond à la qualification de « société à prépondérance immobilière » puisque son actif est principalement constitué d’immeubles ou de droits immobiliers.

Mais l’acquéreur considère que l’appréciation de cette prépondérance immobilière d’une société ne doit pas s’apprécier sur le seul critère de la composition de son actif. Ici, cette société a une activité reconnue d’exploitation forestière, consistant à transformer les arbres en stock.

Mais le juge ne va pas suivre son raisonnement. Il relève que :

  • les fonds de terre sont immeubles par nature et que les coupes ordinaires des bois taillis ou de futaies mises en coupes réglées ne deviennent meubles qu’au fur et à mesure que les arbres sont abattus ;
  • la société est une société d’exploitation forestière, dont les actions ont été estimées principalement au regard de la valeur des arbres qu’elle détient ;
  • les peuplements forestiers que détient la société sont des actifs immobiliers.

En clair, cette société est bien une société à prépondérance immobilière.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 7 mai 2019, n° 17-13591

Prépondérance immobilière : par rapport à quoi ? © Copyright WebLex – 2019

17
Mai

La dénonciation fiscale rémunérée… pérennisée !

Initialement fixé pour 2 ans, et mis en place à titre expérimental, le dispositif permettant à l’administration fiscale de rémunérer les personnes qui lui communiquent des informations conduisant à un redressement fiscal est pérennisé. Retour sur ce dispositif de « dénonciation fiscale »…

Dénonciation fiscale : des conditions précises

L’administration fiscale est autorisée à indemniser les personnes qui lui fournissent des renseignements ayant conduit à la découverte d’un manquement à une obligation fiscale, source d’un redressement fiscal.

Mais cela suppose que les informations portées à la connaissance de l’administration soient suffisamment graves, décrites avec précision et susceptibles de justifier un début d’enquête permettant de les corroborer et de vérifier la véracité des faits allégués, afin d’identifier le procédé de fraude et les enjeux fiscaux.

Et ces informations ne doivent pas être délivrées anonymement : il faut donc que le délateur s’identifie auprès de l’administration pour que les informations délivrées soient prises en compte.

Et cette dénonciation rémunérée ne vaut que pour des infractions précises : pour faire simple, il s’agit de celles qui visent les fraudes fiscales (fraude au domicile fiscal, corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, réglementation des prix de transfert, bénéfices réalisés via des entreprises installées dans des zones à fiscalité privilégiée, etc.).

Quant à la rémunération, peu d’informations sont fournies pour le moment : tout juste est-il précisé que la décision d’attribution de l’indemnité est prise par le Directeur Général des Finances Publiques, qui en fixe le montant, sur proposition du Directeur de la Direction Nationale d’Enquêtes Fiscales, par référence aux montants estimés des impôts éludés.

Source : Décret n° 2019-459 du 15 mai 2019 modifiant le Décret n°2017-601 pris pour l’application de l’article 109 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017

La dénonciation fiscale rémunérée… pérennisée ! © Copyright WebLex – 2019

16
Mai

Avis à tiers détenteur (ATD) : pas de TVA sur les frais bancaires !

Une banque reçoit un avis à tiers détenteur (ATD) concernant l’un de ses clients. Elle l’exécute et facture en conséquence des frais bancaires au client visé par l’ATD. Doit-elle facturer, en sus, de la TVA ? Réponse…

Avis à tiers détenteur : les frais bancaires sont exonérés de TVA !

Une banque reçoit de la part des services fiscaux un avis à tiers détenteur concernant l’un de ses clients. Elle l’exécute et facture donc à ce client des frais bancaires en application de la convention de compte conclue avec lui.

A l’occasion d’un contrôle fiscal, l’administration s’aperçoit que les frais bancaires appliqués par la banque en exécution de l’ATD n’ont pas été soumis à TVA. Parce que ces frais sont prévus par la convention de compte conclue avec le client, elle considère qu’il existe bien un lien direct entre la prestation fournie par la banque et la rétribution perçue à ce titre. Ces frais doivent donc être soumis à TVA.

Mais la banque considère au contraire que lorsqu’elle réalise une opération de transfert de fonds au profit des services fiscaux en exécution d’un ATD, elle agit en vertu d’une obligation légale : elle ne rend aucun service économique à son client. Le redressement fiscal n’est donc pas justifié, selon elle.

Ce que confirme le juge qui estime ici que :

  • l’obligation pour la banque d’exécuter un avis à tiers détenteur ne résulte pas de la relation contractuelle avec son client, mais de la demande qui lui est faite par l’administration fiscale ;
  • le client ne peut être regardé comme tirant un avantage de ces opérations ;
  • l’avis à tiers détenteur rend la banque personnellement débitrice des sommes dues au Trésor public par son client, dans la limite des fonds disponibles sur les comptes de ce dernier et sous réserve de laisser à sa disposition une somme à caractère alimentaire ;
  • les opérations accomplies, à ce titre, par la banque à la réception d’un avis à tiers détenteur, qui ont pour seul objet le paiement d’une créance dont elle est personnellement redevable, ne constituent pas des prestations de services accomplies au bénéfice du Trésor Public.

Pour toutes ces raisons, les opérations accomplies par une banque à la réception d’un avis à tiers détenteur ne constituent pas des prestations de services : elles ne sont donc pas soumises à TVA.

Source : Arrêt du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, n° 412570

Avis à tiers détenteur (ATD) : pas de TVA sur les frais bancaires ! © Copyright WebLex – 2019

15
Mai

Les petites histoires de la taxe sur les surfaces commerciales…

Si vous exploitez un commerce de vente au détail, vous êtes susceptible d’être concerné par la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom). Mais encore faut-il que tous les critères et conditions pour y être assujetti soient effectivement réunis. Exemples… ou contre-exemples…

Tascom : une question d’activité

Une société exploite une concession automobile : elle commercialise donc des voitures neuves, mais aussi des véhicules d’occasion qu’elle propose à la vente après, le cas échéant, des travaux de remise en état.

Cette société estime que le chiffre d’affaires généré par la vente de véhicules d’occasion, remis en état par ses soins, ne doit pas être pris en compte pour le calcul de la Tascom : selon elle, cette activité ne répond pas à la définition du commerce de vente au détail.

Or, le chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du taux de la taxe sur les surfaces commerciales s’entend de celui qui correspond à l’ensemble des ventes au détail. Et le commerce de détail consiste à vendre des marchandises dans l’état où elles sont achetées, ou le cas échéant après transformations mineures ou manipulations usuelles telles que le reconditionnement, généralement à une clientèle de particuliers, quelles que soient les quantités vendues.

Mais le juge a constaté ici que les travaux de réparation et de remise en état des véhicules d’occasion représentent en moyenne 6 à 8 % du chiffre d’affaires de l’activité de vente de véhicules d’occasion. Pour lui, ces travaux constituent des transformations mineures.

L’administration a raison ici : il faut prendre en compte le chiffre d’affaires lié à la vente des véhicules d’occasion pour le calcul de la Tascom.

Tascom : une question d’activité (suite)

Dans une autre affaire, l’administration fiscale s’est étonnée de ce qu’une société exploitant une activité d’achat-revente tant auprès des professionnels que des particuliers et une activité de dépôt-vente à destination des particuliers ne payait pas la Tascom.

Et pourtant, eu égard à la surface des locaux dans lesquels elle exerce son activité et au montant du chiffre d’affaires réalisé au titre de ses activités d’achat-revente et de dépôt-vente, elle est normalement concernée par cette taxe.

Mais la société estime qu’elle exerce une activité de prestataire de service, ne relevant pas de la catégorie des ventes au détail (prise en considération pour l’assujettissement à la Tascom).

A tort, pour le juge : l’activité de dépôt-vente, consiste, pour la société, à exposer dans son magasin des marchandises qu’elle n’achète pas, mais qui lui sont remises par des particuliers qui lui ont donné mandat de les vendre pour leur compte et de leur restituer le produit de cette vente minoré d’une commission rémunérant son activité d’intermédiaire. Cette activité permet que soit réalisée, au sein du magasin, la vente en l’état de marchandises à des consommateurs finaux, c’est-à-dire une vente au détail.

Tascom : une question de surface

Une société exploite un local commercial qu’elle utilise pour la vente de 2-roues. Parce que son local mesure plus de 400 m² (412 m² exactement), l’administration considère qu’elle doit acquitter la taxe sur les surfaces commerciales.

Mais la société considère qu’il faut déduire de la surface de 412 mètres carrés retenue par l’administration une surface de 5,30 mètres carrés correspondant à une banque d’accueil non ouverte au public et une surface de 9,10 mètres carrés correspondant à un ensemble d’éléments de structure qui empêche l’exposition des marchandises et la libre circulation de la clientèle.

Or, la surface de vente des magasins de commerce de détail, prise en compte pour le calcul de la taxe, doit s’entendre des espaces affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, de ceux affectés à l’exposition des marchandises proposées à la vente, à leur paiement et de ceux affectés à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente.

Le juge a ici constaté que :

  • la banque d’accueil réservée au personnel (5,30 m²) n’est pas séparée du reste du hall d’exposition par une cloison et sert à l’encaissement des achats des clients et à l’exposition d’objets publicitaires ;
  • la superficie correspondant à l’emprise au sol de poutres verticales (9,10 m²) doit, en revanche, être exclue pour le calcul de la surface de vente, alors même que ces poutres servent de support à des présentoirs, porte-accessoires et porte-manteaux, dès lors que la surface de vente comprise dans l’assiette de la taxe doit être mesurée à partir du seul nu intérieur des murs.

Il en résulte que la surface de vente est bien supérieure à 400 m² : la taxe sur les surfaces commerciales est due…

Dans une autre affaire similaire, le juge a considéré que l’espace d’attente contigu aux bureaux de vente dans une concession automobile représente une zone indissociable de ces derniers : ils sont donc pris en compte pour le calcul de la surface, et donc l’assujettissement à la Tascom.

Et, à titre d’information, il en sera de même pour l’aire de livraison des véhicules vendus (bien que ne participant pas directement à la promotion commerciale de la société), les bureaux fermés utilisés pour finaliser le processus d’achat des véhicules, etc.

Source :

  • Arrêt du Conseil d’Etat du 24 octobre 2018, n° 419362
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 30 janvier 2019, n° 412251
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 15 février 2019, n° 419483
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 17 avril 2019, n° 411333
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, n° 420348

Les petites histoires de la taxe sur les surfaces commerciales… © Copyright WebLex – 2019

14
Mai

Vente d’un local à transformer en logement : précision utile

Une société qui vend un immeuble destiné à être transformé en logement bénéficie d’un régime fiscal avantageux, via l’application d’un taux réduit d’IS (19 %) appliqué au gain réalisé. Mais cela suppose de respecter des conditions, dont l’une concerne spécifiquement l’acquéreur.

Vente d’un local et taux réduit IS : tout dépend qui achète !

Pour rappel, l’impôt sur les sociétés est calculé au taux réduit de 19 % à raison des gains réalisés à l’occasion de la vente d’un local à usage de bureau, ou à usage commercial ou industriel, ou lors de la cession d’un terrain à bâtir, réalisée depuis le 1er janvier 2018. L’objectif est, ici, d’inciter les propriétaires à céder ces biens en vue de favoriser la réhabilitation et la construction de logements.

Mais ce régime suppose que l’acquéreur s’engage à transformer le local en logement (ou à construire des logements) dans les 4 ans qui suivent la date de clôture de l’exercice d’achat du bien.

Et cet acquéreur doit respecter des critères précis : il doit s’agir d’une société soumise à l’IS, d’une société immobilière spécialisée (sociétés d’investissements immobiliers cotées, sociétés civiles de placement immobilier, sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable…), d’un organisme, d’une société ou d’une association en charge du logement social et, pour les cessions réalisées depuis le 1er janvier 2018, d’une société civile de construction-vente.

En dehors de ces hypothèses, le taux réduit d’IS de 19 % ne s’applique pas à la vente.

C’est ce qui vient d’être rappelé par le Gouvernement à propos de la vente de bureaux par la société anonyme de construction de la ville de Lyon (SACVL) à une SCI.

La SCI n’étant pas, ici, soumise à l’IS, et quand bien même tous ses associés seraient des sociétés elles-mêmes soumises à l’S, la vente ne peut être taxée au taux de 19 %.

Source : Réponse ministérielle Rudigoz, Assemblée Nationale, du 16 avril 2019, n° 2279

Vente d’un local à transformer en logement : précision utile © Copyright WebLex – 2019

9
Mai

Contrôle fiscal : un recours hiérarchique sur demande…précise !

Un couple fait l’objet d’un contrôle fiscal qui aboutit à un rehaussement de son impôt sur le revenu, redressement fiscal qu’il va contester. Et il va demander à rencontrer l’interlocuteur départemental. Une demande restée sans suite… et sans conséquence sur le redressement fiscal : pourquoi ?

La demande de rencontre du supérieur hiérarchique doit être précise

A l’issue d’un contrôle fiscal, l’administration rehausse l’impôt personnel d’un couple, au titre des traitements et salaires, d’une part, et au titre des revenus d’origine indéterminée, d’autre part.

Comme il estime en avoir le droit, il demande à voir l’interlocuteur départemental pour discuter avec lui de son redressement fiscal. Mais sa demande est circonscrite au seul redressement qui vise les revenus d’origine indéterminée. Et elle restera finalement sans suite…

Parce que le redressement fiscal au titre des traitements et salaires est maintenu, le couple va chercher à en obtenir l’annulation pour irrégularité de procédure : il estime avoir été privé de son droit de discuter du redressement propre aux traitements et salaires avec l’interlocuteur départemental, sa demande de rencontre étant restée sans suite.

Mais sa demande ne portant que sur les revenus d’origine indéterminée, elle ne peut avoir de conséquences sur le redressement portant sur les traitements et salaires.

Ce que confirme le juge : certes, obtenir un débat avec un fonctionnaire de l’administration fiscale de rang plus élevé que le supérieur hiérarchique du vérificateur est une garantie prévue par la charte du contribuable vérifié. Mais si la demande est limitée à certains chefs de rectification sur lesquels persistaient des divergences importantes, on ne peut pas considérer avoir été privé de cette garantie pour les autres chefs de rectification encore en litige. La procédure ne peut donc pas être jugée irrégulière pour ce motif.

Source : Arrêt du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, n° 412769

Contrôle fiscal : « Je veux parler à votre supérieur ! » © Copyright WebLex – 2019