Actualités

5
Mar

Engagement de caution (dis)proportionné : un cas vécu…

Une banque demande au dirigeant d’une société qui ne rembourse plus les échéances d’emprunt dues d’honorer son engagement de caution. Ce que le dirigeant refuse, estimant qu’il est disproportionné, et donc nul, au regard de l’évaluation des parts sociales qu’il détient dans sa société faite par la banque… A-t-il raison ?

Engagement de caution disproportionné = engagement de caution nul !

Un dirigeant se porte caution d’un prêt bancaire consenti à sa société pour acheter un fonds de commerce de pharmacie. Par la suite, sa société fait l’objet d’une procédure de sauvegarde et pour recouvrer les sommes encore dues, la banque demande à la caution d’honorer son engagement de caution.

Mais le dirigeant refuse d’y donner suite, estimant que son engagement de caution est disproportionné au regard de ses capacités financières, ce qui le rend nul et lui permet de ne pas rembourser les échéances encore dues par sa société.

Il constate que, pour apprécier ses capacités financières, le banque a procédé à une évaluation des parts sociales qu’il détient dans sa société, en estimant les résultats que la société compte raisonnablement obtenir dans un futur proche.

Pour déterminer ces résultats à venir, la banque s’est basée sur le chiffre d’affaires moyen réalisé au cours 4 derniers exercices par le précédent exploitant du fonds de commerce acheté par la société.

Or, le dirigeant considère que cet élément n’aurait pas dû être pris en compte. Il développe pour cela 3 arguments.

Tout d’abord, il estime que le calcul effectué par la banque ne s’applique qu’au fonds de commerce et n’est pas transposable à la société, dont la valorisation est composée d’éléments actifs et passifs.

Ensuite, il rappelle qu’au jour de la signature de son engagement de caution, la société venait d’être créée et qu’elle n’avait alors débuté aucune activité effective.

Enfin, il rappelle que la société n’était pas encore propriétaire du fonds de commerce et lorsqu’elle l’est devenue, l’actif représenté par le fonds a eu pour contrepartie un passif de même montant (correspondant au prêt bancaire souscrit pour financer intégralement son acquisition).

Par conséquent, le dirigeant considère que les parts sociales doivent être évaluées à leur valeur nominale, sans tenir compte des résultats à venir.

Or, en appliquant une valeur nominale à ces parts sociales, il en ressort que le dirigeant a souscrit un engagement de caution manifestement disproportionné à ses biens et revenus, ce qui le rend nul. Ce que confirme le juge.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 13 février 2019, n° 17-23186

Engagement de caution (dis)proportionné : un cas vécu… © Copyright WebLex – 2019

5
Mar

Normes parasismiques non respectées = démolition de la maison ?

Parce que, lors de la construction de sa maison, les normes parasismiques n’ont pas été respectées, un propriétaire réclame la démolition, puis la reconstruction de sa maison. Mais les professionnels qui ont construit la maison proposent plutôt de réaliser des travaux de reprise. Quelle solution va retenir le juge ?

Normes parasismiques non-respectées : démolition ou travaux de reprise ?

Le propriétaire d’un terrain situé dans une zone sismique y fait construire une maison. Mais par la suite, il apprend que les normes parasismiques n’ont pas été respectées.

Le propriétaire demande alors à l’architecte et aux constructeurs de lui verser 870 000 €, cette somme correspondant aux frais de démolition-reconstruction de la maison.

Ce que refusent les professionnels : rapport d’expertise à l’appui, ils démontrent que 2 techniques permettent d’effectuer des travaux de reprise sur la maison, sans qu’il soit nécessaire de la détruire, pour un montant d’environ 372 000 €. D’autant que l’une des techniques préconisées, si elle était mise en œuvre, rendrait la maison beaucoup plus stable que ce qu’exigent les normes parasismiques.

Le juge va donc donner raison aux professionnels, car la solution proposée par ceux-ci :

  • permet de réparer intégralement le préjudice du particulier,
  • est validée par des experts ;
  • offre des garanties supérieures à la réglementation parasismique.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 14 février 2019, n° 18-11836

Construction et normes parasismiques non respectées = on démolit tout ? © Copyright WebLex – 2019

5
Mar

Cabinet d’architecture : relire la convention collective

Une société d’architecture décide de licencier pour faute grave un dessinateur. Mais, entre l’entretien préalable et le licenciement effectif, il s’est écoulé 1 mois, là où la convention collective impose un délai de 10 jours maximum. Le licenciement n’est donc pas valable estime le salarié. Et pourtant…

Délai de notification de licenciement : 10 jours… sauf suspension possible ?

Engagé par une société d’architecture, en qualité de dessinateur, un salarié a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à licenciement qui s’est tenu un 10 mars, puis licencié pour faute grave le 11 avril suivant.

L’employeur l’a, en pratique, sanctionné pour avoir relayé des informations confidentielles de nature salariale et tenu des propos péjoratifs, via son adresse mail professionnelle.

Mais le salarié, qui a attentivement relu la convention collective, conteste la régularité de la procédure de licenciement suivie par son employeur : la convention collective nationale des entreprises d’architecture (du 27 février 2003) prévoit que l’employeur dispose d’un délai de 10 jours à compter de l’entretien préalable pour licencier un salarié. Ce qui n’est pas le cas ici…

Certes, reconnaît l’employeur, mais les circonstances de ce licenciement sont un peu particulières, rappelle-t-il. Pour prouver la matérialité des faits et s’assurer que le salarié était bien l’auteur des faits reprochés, il a dû mener des investigations, tant sur le plan technique que factuel : d’autres salariés pouvaient connaître ses codes d’accès à son ordinateur, son ordinateur aurait pu être utilisé en ouvrant une nouvelle session, etc.

Ces investigations, qui nécessitaient l’intervention de son prestataire informatique, n’ont pas pu être menées dans le strict respect du délai de 10 jours imposé par la convention collective. Mais, dès qu’il a eu les résultats des investigations (le 10 avril), établissant que le salarié incriminé était bien l’auteur des messages fautifs, il lui a adressé, dès le lendemain, la lettre de licenciement.

Pour l’employeur, il faut donc considérer que le délai de 10 jours est nécessairement suspendu le temps de ces investigations : ici, le délai de 10 jours, suspendu du 12 mars au 10 avril, a recommencé à courir le 10 et a été respecté par l’envoi d’une lettre de licenciement le 11 avril.

Ce que confirme le juge ! Le fait, pour le salarié, de nier au cours de l’entretien préalable être l’auteur des faits, en mettant en avant des éléments de contestation tant sur le plan factuel que technique, des investigations avant toute prise de décision, lesquelles avaient été engagées par l’employeur dès le lendemain de l’entretien, étaient légitimes. Le délai conventionnel est donc suspendu pendant ce temps.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 13 février 2019, n° 17-13749

Cabinet d’architecture : relire la convention collective © Copyright WebLex – 2019

5
Mar

Liberté d’expression : abus = limite !

Un salarié tient des propos tendant à critiquer l’organisation de l’entreprise qui l’emploie. Des propos toutefois trop véhéments, constate l’entreprise, qui décide de le licencier. Au mépris de sa liberté d’expression, conteste le salarié…

Liberté d’expression : défense d’abuser !

Un salarié a, par courrier, tenu des propos véhéments, voire injurieux et infamants aux yeux de son employeur. Il y explique qu’il refuse « d’accourir ventre à terre pour répondre à l’injonction hiérarchique bête et méchante » ; il qualifie de « torchon » une lettre adressée par le directeur ; il écrit que ce dernier ment « effrontément », qu’il « joue au caporal », etc.

Des propos qui excèdent largement la liberté d’expression dont jouit tout salarié, estime son employeur qui décide de le licencier.

Mais le salarié conteste ce licenciement : tout salarié est en droit de critiquer tant l’organisation de l’entreprise que des propos, des décisions ou des méthodes qui lui paraissent inappropriés, estime-t-il.

Certes, reconnaît le juge, mais la véhémence des propos constitue, ici, un abus de la liberté d’expression du salarié caractérisant une cause réelle et sérieuse de licenciement, et ce, d’autant que ces propos ont eux-mêmes été largement diffusés au sein de l’entreprise.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 13 février 2019, n° 17-15928

La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ? © Copyright WebLex – 2019

4
Mar

Groupe de sociétés = plusieurs employeurs ?

2 sociétés appartenant à un même groupe, qui ont les mêmes dirigeants, qui emploient des salariés pour accomplir les mêmes tâches pour les mêmes clients peuvent-elles être considérées comme « co-employeur », avec toutes les conséquences que cela suppose ? Réponse…

Co-emploi = confusion d’intérêt

Un salarié fait l’objet d’un licenciement économique par son entreprise, placée en redressement judiciaire. Mais, parce que cette même entreprise fait partie d’un groupe, il va contester ce licenciement, estimant être en situation de co-emploi.

Il se trouve que l’entreprise, en redressement judiciaire, qui l’a licencié est détenue par une autre société. Or, les salariés de ces 2 sociétés accomplissent les mêmes tâches pour les mêmes clients, partagent les mêmes dirigeants.

En outre, la société-mère assure directement la gestion administrative du personnel de la société filiale qui l’employait, par l’entremise d’un responsable qui valide notamment les dates des congés payés.

Tous ces éléments caractérisent, selon le salarié licencié, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction, de sorte qu’il s’estime toujours sous la subordination de la société-mère.

Un argument que n’entend toutefois pas le juge. Certes, reconnaît-il, une société faisant partie d’un groupe peut être considérée comme un co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre. Mais, hors l’existence d’un lien de subordination, cela suppose qu’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés du groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction. Et cette « confusion » se manifeste par une immixtion dans la gestion économique et sociale de la société.

Mais, ici, le critère de l’immixtion dans la gestion de la filiale n’est, selon le juge, pas caractérisé. Ainsi, même si la société mère et sa filiale ont les mêmes dirigeants, si le salarié a pu accomplir les mêmes tâches qu’un salarié de l’autre société et pour les mêmes clients, si la gestion administrative du personnel est assurée par un responsable de la société mère, ces éléments sont toutefois insuffisants pour caractériser une confusion d’intérêts, d’activité et de direction.

Conclusion : la société-mère n’est donc pas le co-employeur du salarié licencié pour motif économique par sa filiale.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale du 13 février 2019, n° 17-15903

Groupe de sociétés = plusieurs employeurs ? © Copyright WebLex – 2019

4
Mar

Faire figurer ses CGV au verso de ses factures : bonne ou mauvaise idée ?

Comme le prévoient ses CGV et la clause d’attribution de compétence qu’elle comporte, une société assigne en justice une entreprise avec laquelle elle est en litige devant le tribunal mentionné dans ladite clause. Sauf que les CGV ne lui sont pas opposables, répond cette entreprise…

CGV : elles peuvent être tacitement acceptés !

Une société A signe un contrat de distribution de ses produits avec la société B. 8 ans plus tard, le contrat est rompu et la société A assigne en justice la société B en paiement de ses factures.

Mais la société B estime que l’assignation n’a pas été faite devant le bon tribunal : l’action intentée par la société A est donc irrecevable, estime-t-elle.

Ce que conteste la société B : elle rappelle que ses conditions générales de vente (CGV) comportent une clause attribuant la compétence au tribunal devant lequel elle l’a assignée en justice.

Sauf que les CGV lui sont inopposables, répond la société B puisqu’elles n’ont jamais été portées à sa connaissance et qu’elle ne les a pas expressément acceptées.

« Si », répond la société A : les CGV ont figuré au verso des 120 factures qu’elle lui a transmises tout au long des 8 années qu’a duré leur relation d’affaires. Et la clause litigieuse est rédigée en caractère suffisamment gros et en des termes suffisamment clairs et précis pour que la société B en prenne connaissance. Dès lors, il faut considérer que la société B a tacitement accepté ses CGV, estime la société A. Ce que confirme le juge.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 13 février 2019, n° 18-11609

Faire figurer ses CGV au verso de ses factures : bonne ou mauvaise idée ? © Copyright WebLex – 2019